Elle s’élance, l’étoile, légère et vaporeuse. Le buste offert, la tête évanouie, elle se donne à son rêve. Mais n’avez-vous pas vu, dressé derrière le rideau, cet homme en noir, hiératique et sans visage ? Il regarde, il attend, il a la main dans une poche pleine d’argent.
Car en coulisses, c’est une autre scène qui se découvre : l’étoile est une jeune fille pauvre, placée là par sa mère sous l’égide d’un « protecteur », moins amateur de danse que de danseuses. Il est sa chance : celle d’une célébrité ambiguë et d’une fortune rapide.
Son nom? Nana, Manon, Carmen.
Ainsi le musée d’Orsay revêt-il ses apprêts nocturnes, tout en drapés, velours rouge et lumières tamisés, restituant l’ambiance d’une maison close ou d’un hôtel particulier qu’un riche galant aurait offert à sa courtisane, pour nous faire pénétrer dans l’antichambre du Paris du Second Empire et nous exhiber la réalité de destinées féminines tout à la fois solaires et tragiques.